L’Egypte va célébrer demain la fête du Petit Baïram qui achève le mois de jeûne de Ramadan. Des coutumes particulières sont rattachées à cette célébration.
La fête du petit Baïram, le 1er du mois de chaoual, couronne le mois de Ramadan. La dernière semaine qui précède la célébration du Petit Baïram est marquée par les préparatifs de la fête qui va mettre un terme à la période de jeûne. C’est une fête de lumière dans la vie des croyants.
Une fois de plus le mois de Ramadan s’en va et tout doit être prêt pour la fête: les vêtements neufs, les kahk et les biscuits, les bonbons et les multiples friandises. Pendant les derniers jours du mois de Ramadan, les ménagères doivent penser à tout, assaillies par les exigences des enfants, assiégées par les recommandations des époux. de retour du travail, souvent chargés de paquets, et les pères de familles se voient contraints de ressortir pour acheter ce qui manque s’ils ne sont pas mobilisés pour tourner la manivelle du moulinet d’où sortent les pâtisseries de la fête.
Pantalons, robes, chaussettes et chaussures, farine, beurre, sucre, lait, noix de coco, amandes, dattes et figues, autant de nombreuses choses auxquelles il faut penser à acheter pour préparer la fête. La fébrilité, en cette dernière dizaine du mois de Ramadan, est d’autant plus grande que parfois la date de la fin du jeûne est inconnue. Sera-t-elle le 29 ou le 30? Mais maintenant, l’Egypte prévoit à l’avance cette date d’une manière astronomique pour annoncer l’apparition du croissant de la nouvelle lune donnant le signal de la fête. Toutefois, les gens prennent bien soin d’être fins prêts pour le 29 du mois.
Pendant ces derniers jours du mois de Ramadan, les magasins de vêtements et de chaussures, les épiceries, les pâtisseries et les boulangeries sont véritablement pris d’assaut surtout le soir après l’iftar. Les coiffeurs eux-mêmes sont assaillis par une clientèle inaccoutumée. Tout le monde s’agite, travaille éperdument, prépare la fête, achète et court.
Mais seul, au milieu de cette agitation, le messaharati devient triste. En effet, une fois de plus, le rythme de son tambourin va se briser et ne troublera plus les nuits des mois à venir. Il n’aura plus, au matin de la fête, qu’à refaire sa tournée de chaque nuit, toujours en frappant sur son tambourin, pour recueillir la récompense de sa mission pendant les nuits du mois de Ramadan. Il ne dira plus: «Croyants, levez-vous, il est temps de penser à Dieu… Mangez et priez avant l’aurore.»
L’aube de cette nuit de la fête du Petit Baïram emportera avec elle la voix et le chant du messaharati, ainsi que le rythme de son tambourin. Le personnage le plus populaire, mais aussi le plus mystérieux, de ce mois de Ramadan disparaîtra, telle la brume du matin qui se dissipe sous les rayons du soleil sans laisser de traces.
Si le mois de Ramadan s’en va, sa lumière et sa joie restent dans les coeurs renouvelés des croyants grâce au don de Dieu qui apprit aux hommes, dans une caverne du Mont Hira, ce qu’ils ne savaient pas.
Avec la fin du mois de Ramadan, s’en vont aussi les fanous, les lumières, les guirlandes de lampes, les minarets illuminés, mais sa lumière continuera à éclairer les pas des croyants dans leur marche vers le paradis divin.
La fête de la rupture du jeûne, le Petit Baïram, est toutefois la fête de la lumière. Après trente jours de jeûne, de prières assidues, de joies et de relations fraternelles, tout le monde sort un peu illuminé par la grâce de Dieu, un peu meilleur, un peu renouvelé spirituellement. La fête est un nouveau départ après le mois de Ramadan. Le prophète Mahomet, après avoir reçu sa mission dans la caverne du Mont Hira, rentra chez lui et alors commença pour lui une vie nouvelle, celle de «l’envoyé de Dieu».
Entre le dernier iftar et l’aube solennelle de la fête, personne ne dort et les rues ne se vident pas comme aux premières heures de la journée pendant le mois de Ramadan. L’appel à la prière, avec cet «Allah Akbar» répété des milliers des fois de minaret à minaret, commence la célébration de la fête du Petit Baïram.
La prière achevée, de longues processions se dirigent vers les cimetières, car il ne faut pas oublier les morts en ce jour de fête, une tradition héritée des longs siècles de l’histoire égyptienne. Les femmes portent sur la tête un panier recouvert d’un linge blanc. Ce panier est rempli de «fitir», galettes rondes et assez épaisses qui vont être distribuées aux pauvres, de kahk et de biscuits qui seront partagés entre les membres de la famille et les amis en l’honneur des morts et dans leur souvenir.
De retour des cimetières, tout le monde se congratule pour avoir traversé cette période de jeûne du mois de Ramadan et être parvenu à ce matin de fête: «Qoulli sana wa enta tayyib», que chaque année te trouve ainsi en bonne santé, se lancent les passants en s’embrassant.
Pendant ce temps, les enfants s’en donnent à coeur joie dans les rues où les pétards explosent un peu partout, où les confettis volent de droite à gauche.
Alors que les enfants s’amusent, les grandes personnes rentrent chez elles pour le premier repas de la fête. Il y a encore quelques années, le plat de résistance était la «bakala», cette morue salée importée de France, d’Angleterre ou du Canada. La morue était cuite au four avec une sauce spéciale confectionnée avec des oignons hachés et cuits dans de l’huile avec de «l’amar eddine» (la pâte d’amandes) et des raisins de Corinthe. C’était un plat succulent et les tranches de morue s’avalaient avec délice.
D’autres faisaient frire ces tranches de morue dans de l’huile après les avoir roulé dans de la farine. Ces tranches frites étaient ensuite trempées dans un mélange de vinaigre et d’ail. Cette manière de manger la morue le matin de la fête était aussi succulente que la première.
En ce matin de fête, les kahk et les biscuits trônent sur toutes les tables au milieu des friandises: bonbons, dattes sèches, noix, noisettes, amandes, pistaches et les «termes», ces lupins encore appelés «ibn el-bahr», le fils du fleuve car ils sont mis plusieurs jours à tremper dans le fleuve ou un canal dans des paniers en feuilles de palmes.